Dans la grande famille du FPS, Serious Sam a toujours été le cousin débile aux gros bras. Depuis les débuts de la série en 2001, il s’agit de FPS vraiment stupides ayant acquis leurs lettres de noblesses grâce à des affrontements contre des légions gigantesques d’ennemis. Serious Sam 4, qui vient de sortir, entend pousser le concept encore plus loin en proposant des niveaux plus grands et un nombre hallucinant d’adversaires à l’écran. Malheureusement, le jeu est sorti dans un état frôlant la catastrophe industrielle à la limite du scandale…

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La laideur extérieure

La Terre est attaquée par les forces aliens de Mental. Alors que la situation semble désespérée, Sam « Serious » Stone et quelques résistants héroïques s’engagent dans une mission insensée : récupérer le Saint Graal afin de vaincre les forces extra-terrestres. L’occasion pour nous de découvrir sur les tenants et aboutissants d’un conflit qui concerne les terriens dans leur ensemble… Hein ? Vous n’en avez rien à foutre ? Je suis d’accord, mais pas les développeurs de Serious Sam 4 qui nous infligent, dès le début du jeu, des cinématiques vilaines, mal écrites, apparemment doublées par des ivrognes et, surtout, bien trop longues. Pour ma part, je doute fortement que qui ce soit réclamait d’en savoir plus sur le Serious Sam-verse mais voilà, c’est comme ça : si vous voulez jouer à ce jeu, il faudra supporter d’incessantes interventions pseudo-humoristiques, des blagues méta sur le fait d’être dans un AAA, des gags lourdingues sur la personnalité des PNJ… Le tout enrobé dans un scénario un peu trop sérieux derrière le vernis « rigolo ». En réalité, lorsque le jeu s’éloigne de sa propre histoire et propose des personnages complètement idiots et à rebrousse poil, cela fonctionne parfois. Mais de manière générale, cette surcouche narrative est particulièrement pénible et vous n’y échapperez pas.

Bref, après une trop longue scène d’introduction, Serious Sam 4 commence vraiment et nous offre un spectacle véritablement édifiant. Pour commencer, le jeu est très laid, au point de paraître presque anachronique. Si l’on retrouve la direction artistique foutraque habituelle de la série, tout de même bien plus colorée que dans le précédent épisode, on est surtout face à un titre semblant dater de plus de dix ans : aliasing constant, textures baveuses, modèles et décors low poly, gestion de la lumière désuète… Certes, on ne s’attend pas à une incroyable démonstration technologique et graphique lorsque l’on joue à un Serious Sam mais, ici, on est loin des standards de 2020. Cela aurait toutefois été pardonnable – il s’agit après tout d’un projet à budget limité – si les visuels archaïques n’étaient pas accompagnés d’un désastre technique particulièrement lamentable et indigne d’un jeu fini payant plein pot.

Sur ma machine (RTX 2060, i7 7700K@4,2Ghz, 32 Go de RAM), Serious Sam 4 peine à tenir les 80 FPS en 1440p avec le réglage Moyen dans les zones sans ennemis. Dès lors que quelques adversaires apparaissent, il se permet régulièrement de descendre sous la barre des 40 FPS. En réglage Élevé, le framerate oscille entre 70 et… 15 images par seconde dans les plus grandes cartes. Mais ce n’est pas tout, car le jeu déborde d’aberrations : stuttering imprévisible, clipping permanent même lorsque le LOD est à fond, apparition d’ombres à moins d’un mètre, géométrie aléatoire, enchevêtrement de décors, chargements longuets même sur SSD, textures aux couleurs étranges… Au lieu d’évoluer, Serious Sam 4 semble régresser et donne un véritable bazar qui pique les yeux et fait mal au crâne. Vous n’échapperez pas non plus aux bugs, comme de multiples crashs lors de chargement de sauvegarde, des erreurs de script empêchant de continuer l’aventure, des téléportations du joueur impromptues, des boucles musicales qui ne se terminent jamais, les sous-titres VF parfois aux abonnés absents ou en VO, les projectiles ennemis passant à travers les décors ou encore le ragdoll qui semble prendre des cours de zumba… Un niveau de finition rarement vu pour un jeu prétendument terminé et à peine digne d’un titre en accès anticipé. Lorsque l’on voit la propreté des opus HD sortis auparavant, on ne peut que se poser la question : que s’est-il passé durant le développement de Serious Sam 4 pour en arriver là ?

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Serious s’amuse

Serious Sam 4 serait-il donc le pire FPS de 2020 ? Assurément, non – seul un ignare pourrait affirmer le contraire l’année de sortie de Predator: Hunting Grounds, Disintegration, Comanche ou encore Hellbound. En effet, derrière son horrible et scandaleuse façade, Serious Sam 4 reprend la formule originelle efficace et essaye tout de même de l’actualiser en proposant quelques nouveautés. Bien sûr, on y retrouve le gameplay classique de la série, à savoir qu’il s’agit d’un shooter bourrin complètement écervelé dans lequel notre héros passe d’arènes en arènes en flinguant tout ce qui bouge. Comme d’habitude, le cœur des affrontements consiste à détruire des vagues de centaines d’ennemis bêtes comme leurs pieds en utilisant la technique du circle strafing tout en optimisant son contrôle de foule, tout ça à l’aide d’armes de plus en plus loufoques. Cette fois-ci, les développeurs ont d’ailleurs revu leur copie et proposent des mouvements plus fluides et rapides que dans Serious Sam 3, ce qui est franchement une bonne chose.

Autant le dire tout de suite, la campagne démarre très mal. Les premiers niveaux sont étriqués, balançant quelques groupes d’ennemis pas si nombreux que ça. Le level design, uniquement basé sur des couloirs, ne permet pas d’affrontements dantesques et on s’ennuie vite malgré la présence du boomstick au bout de quelques minutes de jeu. Et la tristesse des décors n’arrange pas les choses. Toutefois, alors qu’on avance un peu plus loin dans l’aventure, les niveaux deviennent un peu plus ouverts et intéressants, les combats plus nerveux, plus démesurés. De nouveaux ennemis font leur apparition et viennent compléter le bestiaire déjà hétéroclite : gros mastards médiévaux armés de massues, créatures marécageuses puantes, vampires téléporteurs… On peut aussi retrouver un système d’objets consommables à récupérer dans les zones secrètes. Ceux-ci permettent de retourner complètement l’issue d’un combat, en créant par exemple un champ de distorsion ralentissant le temps ou un vortex interdimensionnel aspirant tous les adversaires dans un large rayon. De plus, un système de compétences inédit pour la série vient rythmer la progression lors de la campagne, permettant au joueur de choisir entre plusieurs capacités spéciales (corps à corps redonnant des points de vie, possibilité d’utiliser n’importe quelle arme en akimbo ou de viser en courant, etc.). Bon, ce n’est pas vraiment judicieux de cacher ces fonctionnalités derrière un arbre de compétences, mais que voulez-vous, c’est ça le jeu vidéo moderne.

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Comme tant d’autres choses, Serious Sam 4 est meilleur à deux ou plus. C’est pourquoi il permet de jouer à l’intégralité de la campagne en coopération jusqu’à quatre joueurs. De nombreux paramètres sont disponibles pour personnaliser l’expérience : vies et munitions illimitées ou non, difficulté, nombre d’ennemis et résistance des adversaires… Lors de mes tests, de rares crashes ont néanmoins été à déplorer en multijoueur. Notez également que l’intégration du Steam Workshop est d’ores et déjà prévue, ce qui est une bonne chose : voir les joueurs incarner Billy Herrington, des AE86 ou des Uganda Knuckles tout en défonçant du monstre par milliers est toujours un spectacle fabuleux.

Serious Sam 4 ne s’épanouit vraiment que lorsqu’il lâche du lest, assume son côté absurde et part dans du grand n’importe quoi. Certaines scènes deviennent hilarantes tant le nombre d’adversaire est incroyable et les combats flattent notre cerveau reptilien qui ne veut que TUER TUER TUER. Par exemple, cette séquence où, enfourchant ma moto dans la campagne carcassonnaise, je me suis retrouvé poursuivi par des milliers de kamikaze hurlant à la mort… Ou encore ce passage près du colisée dans lequel le jeu offre des munitions illimitées pour le minigun tandis que des hordes presque infinies de créatures apparaissent. Oh, et impossible de ne pas citer le moment où Sam embarque dans une moissonneuse-batteuse pour ravager quiconque se dresse sur son chemin tout en écoutant de la musique de redneck. Ce genre de scènes est, certes, complètement débile mais aussi diablement efficace. Pour ne rien gâcher, le feeling des armes est vraiment bon, d’autant plus que les adversaires partent en morceaux après chaque tir pour notre plus grande satisfaction.

En définitive, malgré son état vraiment lamentable, les débuts du jeu poussifs et peu intéressants et en dépit de son aspect narratif pénible, on fini par s’amuser sur ce Serious Sam 4. Il est très loin d’être le jeu de l’année, sa recette assez classique ne plaira pas à tout le monde et ses 12 heures de jeu (en difficile) ne sont pas toujours passionnantes mais ça reste du Serious Sam, un gros défouloir idiot qui offre quelques moments de bravoure. Est-ce suffisant pour lui pardonner ses tares ? C’est à vous de voir, mais pour ma part, je ne peux pas le conseiller dans cet état – à part, peut-être, aux fans hardcore de Sam Stone. Pour le moment, les curieux devraient plutôt se diriger vers les versions HD de First et Second Encounter, bien mieux finis et plus cohérents – et, par conséquent, plus agréables à jouer.

Est-ce bien sérieux tout ça ?

Jouer à Serious Sam 4, c’est comme retrouver ce cousin germain un peu concon mais sympa : on s’attend à  passer une bonne soirée avec lui puis on s’aperçoit qu’il est devenu alcoolique. Le jeu a certes un bon fond et arrive à offrir des séquences de défouloir délirant, mais son état technique pathétique, ses finitions ridicules et son aspect affreux le rendent peu recommandable… en attendant des patchs salvateurs qui, on l’espère, corrigeront tout ça. Dommage car il est probable qu’avec un report de quelques mois et un peu d’huile de coude, le résultat eut été différent.

 

Test réalisé à partir d’une version éditeur. Serious Sam est disponible sur Steam au prix de 39,99€ soit environ le double d’un punching ball de bureau pour se défouler devant son écran.

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7 Commentaires


  1. Ah ok l’optimisation est vraiment à chier dans cet état.ok je note.

    Merci pour le test Ruta.

  2. Merci pour le test.

    Pour le stutter, si j’en crois cette vidéo, tu as une charge proco très fluctuante.

    https://m.youtube.com/watch?v=_aCctQ6RHZo

    Et c’est un 8c/8t. Ton 4c/8t doit tout simplement plafonner à 100% de charge proco par à coups = stutter.

    C’est temps de passer aux 8c/16t pour ceux qui remontent des pcs.

  3.  » on ne peut que se poser la question : que s’est-il passé durant le développement de Serious Sam 4 pour en arriver là ? »
    La réponse est: le départ de AlenL (Alen Ladavac) après la sortie de The Talos Principle, qui était le cerveau derrière les Serious Engine. Son remplaçant n’est pas au niveau, ce qui explique notamment les multiples reports de Serious Sam 4, ses innombrables problèmes techniques, et la beta de Serious Sam Fusion qui n’en finit pas.

  4. Merci pour le test.
    J’ai passé un très bon moment sur le jeu perso. Je tiens à souligner aussi que les musiques qui étaient top.

    Déceptions concernant :
    – l’optimisation comme tout le monde
    – pas de modes DM, TDM, etc… avec des maps dédiés contrairement aux premiers épisodes
    – pas de tronçonneuse !!
    – pas d’écran splitté contrairement aux premiers épisodes (sur une TV 4K ça aurait pu envoyer du lourd)

  5. Énormément de problème de microfreeze de mon côté, très pénible. Puis je suis passé en dx11, plus aucun micro freeze au detriment dun framerate moins bon…
    Ryzen 2600, vega64, 16go de ram

  6. Pour ma part j’ai jamais réussi à lancer le jeu. Image

    Demande direct de remboursement à GoG.

  7. Cette désagréable impression que CroTeam a réussis (si l’on peut dire) le 1st et 2nd encounter et n’ont jamais vraiment pu réitérer la chose,à croire que c’était peut être qu’un coup de bol. J’avais détesté le 2 qui partait dans un délire qui était pas le miens, le 3 était une catastrophe et le 4 rien que les premiers trailers faisaient de la peine.

    Du coup les deux premiers en versions HD restent ce qu’ils auront sortis de mieux.

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