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KITSCH : Caractère esthétique d’œuvres et d’objets, souvent à grande diffusion, dont les traits dominants sont l’inauthenticité, la surcharge, le cumul des matières ou des fonctions et souvent le mauvais goût ou la médiocrité.

« Le Kitsch c’est quoi? Tout ce qui est de mauvais goût, pourvu qu’on le regarde au second degré, avec un clin d’œil plein d’humour et assez d’esprit pour ne pas prendre tout cela au sérieux. Exemples de Kitsch : les broches représentant un petit chien en plastique, les objets souvenir, les fleurs artificielles » (Elle, 1er mars 1971)

Si Duke Nukem Forever était sorti en 1971, le magazine féminin Elle l’aurait probablement rangé entre « les objets souvenir » et « les fleurs artificielles ». [–SUITE–]

12 ans de développement, 10 ans de retard

Techniquement, Duke Nukem Forever se situe entre Return to Castle Wolfenstein (2001) et Doom 3 (2004). Quelques passages sont agréables à l’œil, mais la plupart du temps du temps le jeu est vraiment moche. Ce n’est pas seulement dû au moteur graphique et au système d’animations qui sont complètement dépassés, la direction artistique figure également sur le banc des accusés. Pour tout vous dire, et je vous assure que je n’exagère rien, le remake de la carte Hollywood Holocaust est moins beau que l’originale.

Comme si ce n’était pas suffisant, les développeurs ont eu le mauvais goût d’ajouter des filtres rendant le jeu flou à tel point que vous risquez une migraine ophtalmique à force de chercher à accommoder votre vue. Et si vos yeux tiennent le coup, le FOV très étroit et le head bobbing trop accentué risquent de vous rendre nauséeux. Pour ne pas risquer de tomber malade, il vous faudra bidouiller les options du jeu et utiliser le logiciel Flawless Wide Screen. N’oubliez pas non plus de baisser le « mouse precision » qui n’est autre que l’infâme mouse smoothing. Bien sûr, si vous avez fait l’erreur d’acquérir le jeu sur console, vous êtes baisé sur toute la ligne et vous devrez en sus vous farcir des chargements de plus de 40 secondes.

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Le musée des vieilleries

Si Duke Nukem 3D est aussi réputé, c’est parce qu’à l’époque le jeu offrait des tonnes de nouveautés : des décors interactifs, un environnement urbain, un inventaire délirant, un jetpack et beaucoup d’autodérision. Duke Nukem Forever propose tout l’inverse : le jeu est un patchwork de vieilles features vues et revues au cours des dix dernières années. Parcourir la campagne solo, c’est un peu comme se promener dans un musée sur l’histoire des FPS.

Par exemple, vous aurez droit à des énigmes basées sur le poids des objets et à une série de niveaux en voiture identiques à ceux de Half-Life 2. Vous devrez aussi marteler la barre d’espace pour forcer les portes ou pour vous dégager de l’étreinte des monstres. Et comme dans quasiment tous les FPS consoles sortis durant les cinq dernières années, votre personnage ne peut porter que deux armes (même pas trois…) et récupère sa santé automatiquement. Le plus dramatique, c’est que toutes ces vieilles features ont été très mal intégrées : l’auto-regen vous force à vous planquer derrière des caisses, les simili-QTE n’ont aucun intérêt, les énigmes sont nullissimes et les passages en voitures sont pires que ceux de HL2. Et honnêtement, à quoi ça rime de rajouter des bagnoles si c’est pour retirer le jetpack de la campagne solo ?!

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Tuer, tuer, tuer

La plupart des cartes se terminent en moins de 10 minutes. Il y en a une trentaine répartie sur vint quatre chapitres, et contrairement à ce qu’affirmait Randy Pitchford au début de l’année, vous arriverez à bout du jeu en moins de sept heures. Le level design oscille entre le médiocre et le calamiteux. Les niveaux ont beau être linéaires, on réussit tout de même à se retrouver bloqué de temps en temps. Un bon level designerest censé se projeter dans la tête d’un joueur pour essayer d’anticiper ses actions et concevoir son niveau en conséquence. Dans Duke Nukem Forever, c’est souvent l’inverse : vous devez deviner ce que les développeurs attendent de vous pour réussir les puzzles.

Dans la campagne, vous passez beaucoup temps à résoudre des énigmes, piloter des voitures, faire du railshooting, vous amuser avec les éléments interactifs du décor et jouer aux mini-jeux que vous rencontrez ici et là. Les level designer ont mis toute leur énergie dans la création d’une multitude de petites cartes proposant chacune une expérience originale et fourmillant de détails distrayants. Sincèrement, on aurait préféré qu’ils se concentrent un peu plus sur l’aspect FPS, car au final on ne passe pas beaucoup de temps à tuer des ennemis. Et quand c’est le cas, les niveaux sont vraiment mal fichus et les combats en pâtissent. C’est d’autant plus regrettable que les armes sont sympas et qu’il y avait moyen de faire des gunfights pêchus et dynamiques :

Un des très rares passages avec des bons combats

Le multi est une blague

Non, la partie multi-joueurs n’est pas « oldschool ». Elle est simpliste, mal fichue et les cartes sont hideuses, ce n’est pas la même chose du tout ! Duke3D proposait un multi basé sur le map control : pour gagner, il fallait être constamment en possession de l’armure, du mega-health, du jetpack et si possible de la trousse de soin. Avec tout cet attirail, vous pouviez encaisser pas mal de dommages et vous enfuir au milieu d’un affrontement pour tenter de vous refaire une santé. Dans Duke Nukem Forever, à cause de l’auto-regen et de l’impossibilité de porter plus de deux armes à la fois, votre personnage est extrêmement fragile et n’a guère d’options à sa disposition. Les gunfights sont bourrins, mais dans le mauvais sens du terme : vous croisez un ennemi, vous tirez avec l’arme que vous avez en main et une demi seconde plus tard tout est terminé. Les développeurs ont essayé de rendre le jeu un peu fun en proposant quelques cartes à thème avec uniquement des railguns, des pipebombs ou des joueurs miniaturisés, mais ça ne suffit pas à rattraper le massacre. Si vous voulez tout de même tenter le coup, sachez que le server browser est lent au point d’être quasiment inutilisable, qu’il n’y a strictement aucun serveur dédié (ils sont « présents, mais non supportés ») et que la voix sur IP est activée par défaut. D’ici quinze jours, plus personne n’y jouera.

Plus kitsch que oldschool

La campagne solo recycle toutes les vieilles features des dix dernières années pour les mettre en scène de façon maladroite et caricaturale. Même l’humour semble forcé. Cependant, on ne s’y ennuie pas, on peut même s’y amuser. La campagne solo est médiocre, mais elle est suffisamment diversifiée pour qu’on en arrive à bout. Elle se divise en une trentaine de cartes minuscules bourrées de références et d’éléments interactifs. On ne peut pas en dire autant du multi qui est bêtement bourrin : il n’y a aucune finesse, aucun map control, les mouvements sont lents et les combats expéditifs, bref il n’y a plus rien de ce qui faisait le charme du multi de Duke 3D.

A moins d’être trop curieux, gardez vos sous et attendez que le jeu soit bradé à -75% sur Steam. Ca ne saurait tarder.

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Screenshots capturés par nico

Sur Metacritic, D4E récolte des notes qui tournent aux alentours de 50%.

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