Cela fait maintenant vingt ans que NoFrag tente de conserver sa ligne éditoriale à base de tripes et de sang sur les murs. Parfois, un walking sim ou autre puzzle game parvient à nous faire dévier légèrement de notre route, pavée des crânes de nos ennemis, pour aller batifoler avec les papillons. C’est presque le cas de Maquette, premier jeu du studio Graceful Decay, sorti sur Steam le 2 mars dernier, grâce à son concept original et son histoire bien réalisée, mais avec un contenu bien de trop chiche.
Genre : Puzzle-game | Développeur : Graceful Decay | Éditeur : Annapurna Interactive | Plateforme : Steam | Prix : 16,79€ | Configuration recommandée : Intel Core i7-3770 | AMD FX-8350, 4 Go de RAM, Nvidia GTX 1060, 5 Go d’espace libre | Langues : audio en anglais, 17 langues en sous-titres | Date de Sortie : 02/03/2021
Test effectué sur une version commerciale du jeu.
La récursivité au service du gameplay
Maquette est un jeu de puzzle avec un concept plutôt original : on interagit avec une maquette, qui est dans une maquette où se situe le joueur, elle-même incluse dans une maquette. Les objets placés dans la maquette de taille N-1 apparaissent à une taille proportionnelle dans la maquette N et dans la maquette N+1. Regardez-donc une vidéo, ce sera plus simple.
La plupart des énigmes utilisent ce principe pour faire travailler un peu nos méninges. Je ne suis pas expert en jeux de puzzles, donc j’avais un peu peur de me heurter à des problèmes hors de ma portée. Après moins de 3h45 de jeu, qui suffisent pour boucler le tout en prenant le temps de regarder un peu partout et suivre l’histoire, je peux vous dire que mes peurs étaient infondées.
Une histoire efficace pour peu qu’on s’y intéresse
On se promène dans des niveaux qui représentent des souvenirs d’une relation amoureuse. Je ne suis pas très familier avec les jeux traitant du sujet, mais ici, c’est bien réalisé. Le doublage d’une grande qualité (en anglais) y est sans doute pour quelque chose. Et le fait de ne jamais voir de personnage est une technique plutôt habile pour impliquer encore plus le joueur dans l’histoire. Celle-ci est classique et il n’y a pas de rebondissement, mais ça marche très bien. Par contre, pour ceux qui s’en ficheraient et qui voudraient juste faire les énigmes, il y a pas mal de moment « cinématiques » avec des dialogues que l’on ne peut pas passer, ce qui peut être gênant. Je ne l’avais pas remarqué lors de ma première run et ce n’est pas forcément très long, mais cela arrive régulièrement, quasiment entre chaque puzzle. Un mauvais point pour les speedrunners !
Du coté des perfs, Maquette s’en sort correctement puisqu’il tourne dans les 45 FPS en 4K, high preset avec un PC portable doté d’un I7 10750, et une GTX 1660T.
La direction artistique est chouette, surtout sur les niveaux très colorés. Sur les autres, on s’aperçoit qu’il y a finalement peu de détails et c’est moins impressionnant. Cela fait un peu penser à The Witness, un autre jeu de puzzle, autrement plus difficile. Chose remarquable pour un jeu de ce type, on peut régler le FOV. Du côté des déplacements, les puzzle games sont parfois frustrants car ils ne proposent pas une vitesse assez élevée. Ici, c’est correct la plupart du temps, voire même un peu trop brusque quand on est proche des petites maquettes. Un autre point qui peut gêner est la perfectibilité des placements et rotations des objets. Parfois, ça coince un peu et on est gêné pour se déplacer. Rien de rédhibitoire toutefois, on arrive toujours à trouver la bonne position.
Côté technique, le jeu est bien terminé. Le seul petit bug que j’ai rencontré n’était pas bloquant. J’ai noté qu’il était possible de se retrouver coincé sans pouvoir continuer, avec comme seule solution le rechargement de la partie. De ce côté, pas d’inquiétude, il y a des sauvegardes automatiques après chaque puzzle.
Les énigmes
En parlant des puzzles, les règles sont la plupart du temps assez faciles à comprendre. En général, le jeu va demander de modifier la taille d’un objet pour qu’il colle à la situation. Il faudra donc le poser à un endroit de la maquette pour le récupérer dans celle du niveau supérieur ou inférieur, en fonction de ce que l’on veut. J’ai certes été bloqué deux ou trois fois pendant un peu plus de cinq minutes, le temps de comprendre ce que le jeu voulait de moi, mais à partir du moment où l’on saisit ce qu’il faut faire, la logique à utiliser est simple. Et on reste quand même vachement sur sa faim. On a l’impression que les développeurs n’ont pas voulu creuser plus chaque type de puzzle, comme s’ils voulaient éviter de faire de l’ombre à la narration. Il y a de bonnes idées, mais elles donnent un goût de « premier niveau » à chaque fois. Il aurait fallu approfondir chaque principe pour que les joueurs puissent en tirer une satisfaction. Là, réussir une énigme n’est pas spécialement gratifiant : rien ne m’a fait dire que j’avais vraiment été malin.
C’est clairement là pour moi le problème : l’histoire que raconte le jeu prédomine sur les puzzles. Alors certes, celle-ci plutôt sympa, mais encore une fois, c’est trop court. J’aurais aimé plus de challenge. Surtout que la rejouabilité n’est pas folle : d’accord, il y a des succès si l’on speedrun les niveaux, mais dans ce cas-là, il fallait laisser la possibilité de passer les phases non-jouables…
Juste le temps que la colle sèche
Maquette est une réussite d’un point de vue artistique et du gameplay, c’est indéniable. L’histoire est très bien interprétée et fera même peut-être fondre votre petit cœur de cacodémon. Les puzzles ne sont pas trop durs et ne devraient pas vous empêcher de voir la fin. Si vous aimez ça, le jeu vaut le détour. Mais pour ceux qui demandent plus de challenge, tout cela a un goût de trop peu. Trop peu de difficulté, trop peu de puzzles, trop peu de variété : trop court. Peut-être que le souvenir de The Witness m’a donné de faux espoirs quant à la difficulté que l’on pouvait attendre. En tout cas, cela ne suffira pas pour les joueurs qui ne viennent que pour les énigmes.
Maquette est disponible est en promo à -10% pour le lancement, soit 15,11€ sur Steam jusqu’au 8 mars.