Lors d’une interview à The Associated Press durant les 18èmes jeux asiatiques à Jakarta, le président du Comité International Olympique Thomas Bach a affirmé que l’e-sport n’a pas sa place, en tout cas actuellement, au sein du programme du CIO. Ce n’est pas la première fois que le sujet du jeu vidéo comme discipline olympique est abordé, comme nous le révélait nounoursss en mars dernier. Le président déclare :

Capture d’écran 2018 09 06 à 13.33.28« Nous ne pouvons pas avoir dans le programme olympique un jeu qui encourage la violence ou la discrimination. Ce qu’on appelle jeux de tueurs. De notre point de vue, ils sont en contradiction avec les valeurs olympiques et ne peuvent donc pas être acceptés ».

Pour rappel, l’auteur de cette déclaration est champion olympique, médaillé d’or 1976 de… fleuret, une discipline de l’escrime. Certes, cette arme de salon ne fut jamais utilisée sur les champs de bataille, ni même en duel du XVIIIe siècle à nos jours, mais on ne pourrait retirer à cette pratique son origine martiale et fondamentalement violente. Et que penser de la boxe qui, bien que reconnue comme discipline olympique, entraine des conséquences physiques et cérébrales importantes ? Thomas nous répond :

« Bien sûr, chaque sport de combat tire ses origines de combats réels entre les peuples. Mais le sport en est la version civilisée. Si des e-games ont pour but de tuer des gens, cela ne correspond pas à nos valeurs olympiques que nous défendons »

Chassés d’office donc, les titres violents tels que Rocket League (violence en voiture), Hearthstone (violence sur cartes), Fifa (violence en crampons) ou Madden (violence en épaulières, qui peut certes parfois être plus agressif que prévu).

Esport, e-sport, sport électronique

Soyons clairs, au sein de la rédaction, l’envie de promouvoir l’e-sport ne semble pas être une priorité. Quand j’évoque ce sujet, drloser m’accuse de vouloir écrire un marronnier sur les sujets récurrents tels que « le jeu vidéo est-il un art ? » ou « le jeu vidéo est-il un sport ?« . D’autres parlent d’une discipline de mongoliens qui jouent à des jeux mainstreams. El_Tyranos rappelle que la création d’une compétition « sportivise » une activité, que sa pratique soit physique ou non.
rgk souligne que la question de la durée de vie d’un titre semble discréditer le jeu vidéo, par rapport aux pratiques sportives qui existent parfois depuis des siècles. Effectivement, si on imagine des athlètes spécialisés en Island of Nyne ou de Quake live, leur carrière serait de courte durée. Même nos lecteurs ne semblent pas en majorités convaincus comme le révélait notre sondage mené en mars dernier :

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1 lecteur sur 5 est convaincu par le sport électronique.

De mon côté, je suis toujours un peu triste de constater que le jeu vidéo est encore en train de chercher l’assentiment d’organisations externes, pour faire valoir sa légitimité. Déjà, l’e-sport en soit est suffisamment représenté par l’International Esports Federation, à travers assez d’évènements (ESWC, MLG, EVO, ESL, EL et Dreamhack) pour avoir besoin de la validation des ancêtres du CIO. Ensuite le jeu vidéo existe en soit en tant que pratique variée, de la plus casual ou la plus compétitive et il n’y a pas besoin de prétendre qu’il est un sport pour lui donner plus de valeur.

Aucun amateur de littérature ne se bat pour que la lecture soit ajoutée aux jeux olympiques dans la catégorie « vitesse de déchiffrage » ou « lancé de Marcel Proust ». Il existe des foires, des prix littéraires, des concours d’écriture et cela fait partie du domaine littéraire, sans qu’il se sente obligé d’obtenir la validation d’autres milieux culturels.

Throwing a bookSport, art, loisir pour dégénérés ? On peut citer des jeux en exemples qui se rapprochent d’un domaine ou de l’autre, mais fondamentalement, à quoi bon ? Le jeu vidéo est largement pratiqué et tellement riche qu’il est parfois l’un, parfois l’autre (et parfois qu’il reste indéfini), mais surtout qu’il a ses propres codes et qualité qu’on ne saurait retrouver ailleurs. Un jour, peut être que le CIO demandera aux cyberathlètes de faire partie des J.O. et cela se fera naturellement, tout comme le MOMA à intégré 14 jeux vidéo à ses collections en 2012. Est-ce que le fait de savoir qu’un conservateur ait intégré Dwarf fortess à la collection de son musée vous fera y jouer différemment ? J’espère que non.

Et si je veux du challenge, putain de hippie ?

Si ton trip c’est le challenge, nous ne saurions que te conseiller de te tourner vers les organismes de e-sport existants (ceux dont on se garde bien de parler sur le site). Cela dit, suite à notre sondage qui affirme que 1 lecteur de Nofrag sur 5 aime le sport électronique, nous nous sommes malgré tout demandé : comment faire cohabiter nos jeux vidéo violents préférés et le respect de l’adversaire, la non-discrimination, l’égalité entre les hommes et les femmes et développement durable ? Après un intense brainstorming et quelques bières, nous vous proposons quelques pistes, qu’on espère que vous saurez faire évoluer dans les commentaires :


quakechampionshipcioQuake Champions : dans des arènes démilitarisées et dont les arêtes saillantes ont été sécurisées, les cyberathlètes courent de points en point en visant le temps le plus bas. A chaque tour, le joueur gagne une mention : course, double course, mega course, ultra course et il gagne à Monster course.

pubgcioPlayerunknown’s battleground : les cyberathlètes sont regroupés dans un avion unique avec un objectif commun : atterrir sur un point précis, dévoilé en cours de vol. Le premier sur le point gagne la médaille d’or. Les second et troisième doivent atterrir sur la tête du parachutiste gagnant et rester en équilibre.

arma3cioArma 3 : Longtemps confondu, à tort, avec un simulateur militaire, Arma 3 est en réalité un magnifique titre dédié à la course d’orientation en solitaire. Cette discipline donne la part belle à la boussole et demande aux cyberathlètes débrouillardise, connaissance de la nature virtuelle et une condition physique sans faille.

counterstrikecioCounter-Strike : la course de relais-otage (terme traditionnel, l’otage est désormais consentant). Par équipe de 2, les joueurs doivent aller chercher un otage, parcourir le chemin le plus court jusqu’au « Frontyard » puis passer le relais au second coureur qui doit amener l’otage à son point de base.


Et toi lecteur de Nofrag depuis 1987, fidèle vétéran de Battlefield, Doom et Ricochet dont tu maîtrise les arcanes au mouddle, défenseur du vénérable Counterstrike, quelle discipline non-violente et respectant les adversaires, aurais tu à recommander aux notables du comité olympique ? 

 

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