Lors de sa sortie en accès anticipé We Happy Few avait été testé par Kip qui concluait : « Il n’y a pas grand-chose à sauver dans We Happy Few (…) le secret du génie de We Happy Few se trouve peut-être dans sa linéarité, ses scripts, son histoire et sa direction artistique. Tout le reste est malheureusement oubliable. Rendez-vous (peut-être) dans deux ans ». J’ai donc pris rendez-vous avec la version finale du jeu sur laquelle je viens de passer 30h plutôt laborieuses. Quand, à la fin de l’histoire le générique s’est lancé, j’étais soulagé. L’expérience n’avait pas non plus été traumatisante, loin de là, mais j’avais fait une overdose de gameplay superficiel. M’enfin, ça y est, j’allais pouvoir commencer à rédiger mon test. Attendez, qu’est ce qu’il y a écrit en bas à droite là … chargement … chargement du chapitre 2. Comment ça, quoi ?

Le jeu se déroule dans une uchronie où l’Angleterre a été vaincue par les Allemands lors de la Seconde Guerre mondiale. Toute Angleterre ? Non, un archipel d’îles a été épargné grâce à un mystérieux et sombre incident. Ce dernier causant visiblement une déprime générale et pour éviter de se le remémorer, la joy – une drogue hallucinogène et euphorisante – est inventée et massivement distribuée dans toute la région. Votre aventure à vous, Arthur Hastings, elle commence là, dans les années 60, alors que vous êtes au bureau, en qualité de censeur pour un journal de propagande. 1984 es-tu là ?

Pot-trop-pourri

20180813185706 1Après une rapide séquence de censure – rappelant le très bon Paper Please – vous êtes rapidement face à un authentique vrai-faux choix où si vous ingurgitez une première pilule de joy le jeu se relance. Tout ça pour vous forcer à vous donner un air apathique qui vous vaudra ensuite une convocation et un licenciement immédiat. Accompagné d’une expulsion en territoire parias. Ce territoire est au début prometteur. Vaste, il donne, au départ, une impression de liberté. Vous commencez à vous balader, c’est pas forcément joli, c’est même parfois un peu baveux, mais la D.A est intéressante. Vous entamez vos premières cueillettes et comprenez que, malheureusement, il y aura du craft. Puis vous finissez par rencontrer des habitants qui se mettent à vous agresser car vous portez un costume décent qui ne seyait pas avec leur tenues déchirées. Quel monde injuste. Sauvé in extremis, une femme vous explique qu’ici on n’aime pas les gens de la ville et alors commence le défilé de mode.

20180822123518 1Sans trop spoiler, vous l’aurez compris, le but de votre quête principale sera non seulement de reprendre vos quartiers, mais aussi d’aller plus loin en déjouant supercheries, complots et en retrouvant les traces de votre frère que vous avez lâchement abandonné sur le quai de la gare quand il était adolescent. Et pour venir à bout de cette quête – et des nombreuses, mais souvent barbantes, quêtes secondaires – vous allez devoir faire bon nombre d’aller-retours entre diverses régions aux tolérances tout aussi diverses en termes de vêtements. Ce n’est malheureusement pas la seule contrainte qui vous sera imposée. En effet, quand vous serez en ville, vous devrez ingurgiter de la joy pour ne pas éveiller les soupçons des autres passants. Pour vous fournir, aucun problème, il y en a à disposition partout, à chaque coin de rue, etc. Mais attention ! Vous êtes un joueur drogué, pas hyperactif ! Donc, on vous le répète assez dans le jeu, un comportement bizarre – c’est-à-dire, même courir, sauter ou s’accroupir – vous vaudra des regards suspicieux jusqu’à carrément alerter la police ! Mais quel plaisir dites-moi ! D’autant plus que We Happy Few n’échappe pas aux tares des monde-ouvert du pauvre, auxquels on a l’habitude maintenant et est blindé de missions fedex qu’on est souvent forcé de faire en marchant, je vous le rappelle. Supplice ! Et quand il ne s’agira pas de jouer au postier vous serez de toute manière quand même confronté à des situations présentées comme ouvertes et pourtant cloisonnées par des scripts, ou la volonté étriquée des développeurs. 

Ajoutez une gestion de la faim et de la soif envahissante mais inutile puisque vous ne 20180823010940 1manquerez jamais de nourriture ni de boissons. Aussi inutile que l’IA que vous pouvez semer en fuyant dans la ruelle à côté et en vous cachant dans une poubelle. Tant qu’elle ne vous a pas vu y entrer, vous n’avez qu’à patienter quelques dizaines de secondes et vous pourrez à nouveau leur passer devant l’air de rien. Un effet secondaire de la drogue probablement. Vous pouvez donc totalement oublier la composante infiltration pourtant mise en avant par les développeurs. Laissez tomber également la partie craft, mal fichue, qui vous force à fouiller tout le décor pour dégoter le nécessaire mais vous bloque régulièrement à cause d’un inventaire trop vite rempli (et pas forcément intuitif). « Heureusement », grâce aux nombreuses quêtes secondaires vous chopez facilement de quoi augmenter vos compétences, pour par exemple, enfin pouvoir gambader comme bon vous semble aux yeux de tous. Vous finirez même par obtenir de quoi contourner la plupart des contraintes du jeu et, libéré, vous précipiter de le terminer.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Anticipation mal anticipée

20180819125556 1En dehors de ces longs moments passés dans l’inventaire vous apprécierez peut-être des combats au corps à corps plutôt bien foutus avec notamment de bonnes sensations d’écrasement à l’atterrissage de votre arme faite-maison sur le crâne de vos ennemis. De toute façon, il n’y a pas d’arme à feu et vous devrez vous contenter de fléchettes si vous tenez absolument à tirer quelque chose. Cela dit, l’arsenal est varié et vous permet de varier les goûts. De la bombe vomitive à l’alcool qui servira à soudoyer les gardes sans oublier divers bâtons électriques, battes et pelles rouillées. Plus que ça, ce qui constitue l’un des seuls points forts du titre c’est indéniablement ces instants loufoques souvent à la limite entre rire, cynisme et humour noir. Même si, en l’absence de réel enjeu, We Happy Few manque son côté anticipation, il marque par certaines mises en scène, certains personnages et des histoires parfois touchantes. Mais, en ce qui concerne le gameplay, il risque de  procurer plus de frustration que de plaisir.

20180823004904 1Le paroxysme de tout ça, comme je le disais à la fin de mon introduction, c’est qu’au bout de 30h de jeu, alors que le générique déroule et que vous êtes soulagé d’en avoir enfin terminé vous n’avez en fait achevé que le premier des trois chapitres. Le deuxième vous propose d’incarner, Sally, un personnage que vous croisez déjà dans le premier arc, qui est une laborantine capable de fabriquer potions et poisons. Pourquoi pas. Sauf que là encore – sans parler du fait que la séquence débute par une série imposée de va et vient à l’intérieur de son appartement – les développeurs ont choisi d’imposer au joueur une nouvelle contrainte : vous devez faire attention aux besoins de votre nourrisson. Plus libre de vous balader dans les villes certes mais limité par de nouvelles obligations. La perspective d’une nouvelle façon d’appréhender les situations – Sally n’est pas à l’aise au corps à corps – n’a pas suffi à entretenir ma curiosité et la première heure de ce deuxième chapitre m’a conforté dans ce choix. Pauvre troisième arc et troisième personnage, spécialiste des explosions. Une pensée émue à lui.

 

Conclusion

Deux ans après, We Happy Few rate encore le coche et rate surtout toutes les mécaniques qu’il annonce proposer. Il souffre d’un syndrome bien connu qui se répand de plus en plus de nos jours. À trop vouloir multiplier les  éléments de gameplay les développeurs n’en ont peaufiné aucun et ont noyé tout ça dans un monde trop grand. Il y a bien quelques détails qui valent le coup, mais ils sont ensevelis sous des amas de choses inutiles dans une carte  et des lieux qui semblent étirés comme pour allonger artificiellement la durée de vie. C’est d’autant plus dommage que la trame est originale et aurait pu faire son effet dans un jeu plus court et plus condensé. Aux alentours de 50€ actuellement je ne le vous recommande pas. Avec beaucoup de corrections et une grosse baisse de prix il pourra peut-être intéresser les curieux qui n’auront pas peur de perdre leur temps pendant la moitié du jeu.

 

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